Ancien monde, nouveau monde

Ancien monde, nouveau monde… quand j’étais gamin, j’allais souvent me promener avec mes parents le long du sentier des douaniers à Cap d’Ail. Parfois on se plantait dans une crique pour tenter de pêcher quelques pauvres poissons. Empaler une trémouline sur un hameçon m’apparaissait nécessairement un peu cruel mais au bout de la deuxième, la troisième, je m’y faisais et ne prêtait même plus attention aux viscères bruns qui dégoulinaient sur mes doigts. Nous étions tous mauvais pécheurs. Tant mieux pour la faune. Tant pis pour ces pauvres vers marins qui trépassaient au nom de quelques hasardeux espoirs. Mais pourtant, parfois, nous sortions de l’eau quelques pesci : rougets, sars, roquet, de petites rascasses, souvent des gobies ou des castagnoles. Aujourd’hui je n’y retourne guère plus : l’endroit est envahi par toute cette clique mondialiste et friquée qui gravite dans les environs. De jeunes femmes aux allures de top models y font leur jogging habillées en Prada, agitant leurs faux seins au rythme des soubresauts du sentier. Certaines ont leur coach personnel qui les suit, souvent des jeunes bodybuildés dont on ne sait pas trop quel organe de leur cliente ils s’affairent à entretenir le plus… Enfin, je ne veux pas être mesquin, elles ont sans doute d’aussi bonnes raisons de vouloir mettre à distance la cellulite que leur mari volage de se tenir loin du fisc… Bref, je ne sais pas quel monde est le meilleur, l’ancien où l’on étripait les trémoulines avant d’assommer la malheureuse poiscaille, ou le nouveau avec tout son lot de saloperies. Bref, vous connaissez ma réponse, et elle est arbitraire : je préférerai toujours l’ancien, d’autant, bien sûr, que le nouveau ne fait rien pour qu’on se sente le droit d’y appartenir un jour (qui de sain d’esprit le voudrait d’ailleurs ?). MORALE DE L’HISTOIRE : Il vaudra toujours mieux manger du poisson frais plutôt qu’une moule ayant fait trop de route !